Tombe inviolée du Moyen Empire découverte près d’Assouan en Egypte
Même si ce n’est pas celle de Toutankhamon, la découverte d’une tombe intacte de l’époque pharaonique n’est jamais anodine dans un pays où le pillage des nécropoles a été pratiqué intensivement dès l’antiquité. Elle l’est encore moins lorsque son propriétaire était le membre d’une importante dynastie de gouverneurs égyptiens du Moyen-Empire. C’est pourtant la découverte que vient d’effectuer début mars 2017 une équipe d’archéologues menée par Jimenez-Serrano, de l’université de Jaen, qui travaille depuis 2008 près d’Assouan.
L’île d’Eléphantine et la colline du vent.
La tombe a été découverte dans la région d’Assouan, célèbre pour son barrage réalisé dans les années 60, et situé à environ 680 km au sud du Caire. A l’époque pharaonique, Assouan était surtout réputée pour ses carrières de pierre, d’où étaient extraits de nombreux obélisques, mais le siège du pouvoir se trouvait sur l’île d’Elephantine, qui est aujourd’hui l’un des quartiers de la ville.
Nommée Abou durant l’antiquité, l’île fut dès l’Ancien Empire un centre commercial actif, canalisant les échanges avec le pays de Koush et l’Afrique subsaharienne. C’était aussi un siège administratif important, et son aristocratie disposait de sa propre nécropole, située à l’ouest d’Assouan, et creusée dans la colline de Qubbet el-Haza, ce qui signifie la colline du vent.
Le gouverneur d’Elephantine était un personnage important, qui jouait à la fois le rôle de gestionnaire de la région et de commandant des forces militaires qui y étaient stationnées. Or, c’est la tombe d’un proche de ce puissant personnage qui vient d’être découverte.
Une tombe inviolée pendant des milliers d’années.
C’est dans la colline du vent que la tombe a été retrouvée. Ses richesses se constituent principalement de deux sarcophages de cèdre – un bois précieux que les anciens Egyptiens importaient souvent du Liban – l’un extérieur, et l’autre intérieur, dans lesquels se trouvait la momie du défunt.
D’autres offrandes funéraires l’accompagnaient dans l’au-delà, notamment des poteries ou des figurines de bois représentant des scènes de la vie quotidienne – les fameux chebtis, dont plus d’un millier ont été découverts dans une tombe à Louxor. Les archéologues ont aussi retrouvées des modèles réduits de bateaux funéraires, rappelant la barque de Rê, que les pharaons eux-mêmes ne dédaignaient pas d’emporter en taille réelle dans l’eau delà, comme le prouve une découverte récente près de la tombe contemporaine de Sésostris III à Abydos.
Quant à la momie, intacte, elle se trouvait dans un cartonnage polychrome avec un beau masque funéraire et des colliers bien préservés.
Un membre de la dynastie des gouverneurs d’Elephantine.
Or, cette momie n’est pas celle de n’importe qui. Les inscriptions sur les cercueils nous renseignent sur la qualité de son occupant : il s’agissait de Shemai, fils de Khema, le gouverneur d’Elephantine sous le règne d’Amenemhat II, et de Satethotep.
Sarenpout II représenté dans sa tombe, dans nécropole de Qubbet el-Hawa.
Son frère, Sarenpout II, était l’un des plus puissants nomarques d »Egypte au temps des pharaons Sésostris II (-1897 à -1878) et Sésostris III (-1878 à -1843/42). Il portait en outre le titre de gouverneur d’Eléphantine, disposait d’un commandement militaire et avait la responsabilité de plusieurs cultes.
Shemai appartenait donc à une famille aristocratique puissante, et la découverte de sa tombe permet de jeter un peu de lumière sur les personnages vivant à l’ombre du pouvoir, dont on sait finalement peu de choses. Surtout, elle ajoute encore une pierre à la connaissance de cette famille de dynastes de la XIIe dynastie : déjà 14 membres de ce lignage ont été retrouvés, ce qui ouvre une fenêtre unique sur les conditions de vie de l’aristocratie égyptienne il y a plus de 3800 ans.