Abydos, nécropole des premiers pharaons et cité sacrée d’Osiris

Le site archéologique d’Abydos est l’un des plus importants d’Egypte, couvrant une surface totale d’environ 8 km².

Même si Abydos avait une certaine importance en tant que ville, elle n’a jamais égalé les capitales comme Thèbes ou Memphis. Son sanctuaire, quoique très célèbre, n’était pas aussi riche ceux de Thèbes ou d’Héliopolis.

Cependant, au niveau symbolique, Abydos jouissait d’un statut de tout premier plan, qui tenait à son ancienneté et à son statut de cité sacrée d’Osiris, l’un des dieux les plus significatifs du panthéon égyptien.

Cette importance, Abydos la doit en partie à son ancienneté. La cité commence en effet à prendre son essor dès l’époque Nagada, et a probablement été la capitale de la dynastie 0, qui précède l’entrée dans l’histoire pharaonique. Dans tous les cas, elle reste la nécropole des premiers pharaons : Narmer, le premier unificateur du pays, y est enterré avec ses successeurs de la première dynastie. Même si par la suite d’autres nécropoles accueillent aussi des tombes royales, plusieurs pharaons des IIe et IIIe dynasties choisissent encore d’être inhumés en Abydos. Même au Moyen et Nouvel Empire, quelques pharaons y font construire des cénotaphes.

 

Un haut-lieu de l’Egypte prédynastique.

Avec Thinis et quelques autres sites, Abydos a joué un rôle majeur à l’époque prédynastique, période charnière qui précède l’unification du pays et le début de l’Ancien Empire.

 

Umm el Qa’ab, nécropole prédynastique et des premières dynasties.

Umm el Qa’ab signifie en arabe « la mère des poteries », du fait des millions d’éclats de poteries que l’on trouve dans toute la zone, et qui sont les résidus des offrandes apportés par les anciens Egyptiens pendant des siècles sur le lieu supposé de la naissance d’Osiris. Car au Moyen-Empire, il semble qu’on avait perdu le souvenir de l’importance de ce site. Une des tombes ruinées de la nécropole est alors excavée et transformée en petit temple : on considérait alors que c’était l’endroit où Osiris  avait vu le jour, et le temps fort du festival en l’honneur du dieu était la grande procession partant du temple principal vers ce petit sanctuaire.

En 1894 et 95, le site a été fouillé – un bien grand mot en l’occurrence – par l’archéologue français Emile Amélineau, un spécialiste reconnu de l’étude des Coptes. Malheureusement, ses méthodes archéologiques s’avèrent relever plus du pillage que de l’étude scientifique, et il inflige de sévères dommages au site. En 1896, l’archéologue américain Flanders Petrie prend le contrôle de la concession et fouille de nouveau et de manière plus sérieuse les tombes. Bien que de nombreuses informations aient été perdues par les travaux peu scrupuleux d’Amélineau, en s’intéressant aux débris laissés par ses équipes, Petrie parvint à identifier les tombes de tous les pharaons de la première dynastie, ainsi que celles des deux derniers de la seconde.

Depuis les années 70, deux missions européennes poursuivent l’étude du site et ont réalisé de nouvelles découvertes : l’institut Archéologique allemand, conduit par Gunter Dreyer, et le Musée de Pennsylvanie, sous la direction de David O’Connor.

L’équipe allemande a principalement concentré ses efforts sur un site qu’ils ont appelé le Cimetière U. Il s’agit d’un ensemble de tombes aristocratiques dont les plus anciennes remontent à l’époque de Nagada I et II. Le point fort de ces recherches a été la découverte de la Tombe Uq, la plus grande et riche de toutes, qui a certainement été la sépulture du proto-pharaon connu comme le Roi Scorpion. Cette tombe était constitué d’une grande et profond fosse creusée dans le sol et ne contenant pas moins de douze chambres. La plus grande était la chambre funéraire, entourée de salles remplies d’offrandes reflétant sa richesse et les tribus qui lui étaient versés, et devant lui fournir les ressources nécessaires à sa vie dans le royaume des morts. Ainsi, près de 400 jarres de vin ont été découvertes, dont certaines provenaient de régions lointaines comme la Palestine ou Canaan (qui correspond en gros aux actuels Liban et Israël). Au total, elles auraient pu contenir jusqu’à 4000 litres de vin.

Les marques accompagnant ce trésor se sont révélées encore plus importantes pour les chercheurs, car ils représentent les premiers stades de l’écriture hiéroglyphique. Un ancien débat existe concernant l’apparition de cette écriture : s’est-il s’agit d’une imitation des écritures sumériennes de Mésopotamie, où se sont-elles développées indépendamment ? Quelle a été l’influence des Sumériens sur la civilisation égyptienne ?

Il y avait certainement des relations commerciales, même s’il semble qu’il s’agissait presque uniquement d’exportations de la Mésopotamie vers l’Egypte, et que les traces d’un commerce en sens inverse sont très rares. Cela a souvent été considéré comme la preuve d’une influence certaine. Cependant ces signes, certains sur les poteries et d’autres sur de petites plaques d’ivoire, semblent avoir principalement eu des fonctions de comptabilité, et sont sujettes à débat pour savoir dans quelles mesures elles pouvaient aussi représenter des noms ou des endroits.

Ces signes ont en effet 150 ans de plus que les hiéroglyphes connus les plus précoces, mais ils en certainement les ancêtres.

Il est tentant de suivre l’argument classique que la grande taille de ces tombes représente un pas majeur vers la civilisation ; il constitue en tout cas certainement un pas majeur vers l’inégalité.

L’étape suivante est représentée par trois grandes fosses funéraires ont aussi été découvertes, et ont été attribuées aux sépultures des pharaons de la dynastie 0. L’une d’entre elles seraient celle de Narmer, l’unificateur de l’Egypte.

Mais la véritable percée en terme de taille et de complexité est représentée par la tombe du roi Aha, deuxième pharaon de la première dynastie (pour la plupart des Egyptologues), pour laquelle on peut véritablement parler de complexe funéraire. Elle est constituée de trois fosses, une pour la tombe et deux pour les offrandes. Cependant à côté se trouvait aussi une double rangée de 34 fosses secondaires, contenant chacune le corps d’un jeune home dans un cercueil de bois. Ce sont les tombes des domestiques accompagnant leur souverain dans l’autre monde – qu’ils l’aient fait volontairement ou non n’est pas connu. Cette étape est souvent vue comme la manifestation d’une structure hiérarchique plus forte, où le roi a le pouvoir de décréter que des serviteurs l’accompagneront dans l’au-delà.

Les sépultures postérieures prolongent cette pratique, et beaucoup d’entre elles sont composes de grandes fosses funéraires contenant non seulement des salles pour les offrandes de nourriture et de boisson, mais aussi des rangées et des rangées de salles secondaires contenant des sépultures, la plupart du temps d’hommes jeunes. Les complexes funéraires les plus récents avaient des marches y conduisant pour en faciliter l’accès, tandis que les plus anciens étaient seulement accessibles depuis le toit. C’est pourquoi on considère que ces sépultures secondaires ont toutes été réalisées au même moment, et pourraient ainsi constituer une forme précoce de sati ou suttee, où les domestiques sont mis à mort pour accompagner leur maître dans l’au-delà, et enfermés avec lui dans la même tombe quand l’accès par le toit est scellé. Dans l’un des cas, pour le roi Djer, un total de 318 serviteurs se trouvaient dans la tombe.

Mais progressivement cette pratique déclina dès la première dynastie, et ses dernières tombes ne comptent pas plus d’une douzaine de tombes auxiliaires. On ignore pourquoi cette pratique a disparu, même si l’on peut supposer qu’elle n’était pas nécessairement viable, la société perdant à chaque fois un important nombre d’hommes.

Cette pratique trouve des échos dans de nombreuses autres civilisations, notamment à Ur ou en Chine, où il était aussi d’usage que des domestiques accompagnent les membres de l’aristocratie (voir article sur les Shang). Dans tous les cas, ces pratiques semblent aussi y avoir disparues (a verifier).

Des sépultures ont continue à être aménagées à Abydos jusqu’à la fin de la première dynastie. Puis, les pharaons ont préféré se faire inhumer près de Memphis, la nouvelle capitale située en Basse-Egypte. Seuls les deux derniers pharaons de la deuxième dynastie ont fait aménager leurs tombes à Abydos. Mais la troisième dynastie préfère finalement Saqqarah, près de Memphis, où est aménagée la première pyramide à degrés pour le pharaon Djezer.

 

 

Shunet el Zebib et les mystérieux enclos des premiers pharaons.

Les anciennes nécropoles d’Abydos ont une autre caractéristique. Dans le désert, à 1,5 km de la nécropole don’t nous venons de parler, se trouve un enclos muré de grandes proportions, appelé Shunet el Zebib par les Arabes. Il couvre une surface d’un-demi ou d’un hectare, et ses murs s’élèvent toujours à plus de onze mètres de haut. Ils comportent par ailleurs une série de pilastres extérieurs, appelés indentations, qui sont typiques de l’architecture palatiale et suggèrent qu’on a cherché à les imiter. L’intérieur apparaît vide, à l’exception d’une petite chapelle mortuaire, mais ont a pu la dater par les inscriptions du roi Khasekehmwy, le dernier pharaon de la deuxième dynastie.

Il s’agissait d’un mystère, jusqu’à ce que le chef de la mission américaine, David O’Connor, ait commencé à fouiller les zones environnantes et a découvert qu’une demi-douzaine d’enclos similaires se trouvaient là. Entre deux de ces enclose, une rangée de 15 navires avaient aussi été enterrés. Il les fouilla et parvint à attribuer chacun d’entre eux à un pharaon different. Il semble que chaque pharaon ait fait construire un enclos, qui fut ensuite rapidement démoli pour la construction de celui de son successeur, expliquant qu’à la fin seul celui du dernier pharaon ait survécu.

Leur fonction reste incertaine, mais on a pu suggérer qu’ils avaient été construits comme enclos palatiaux, ou le corps pouvait reposer jusqu’à ce que sa tombe soit prête à le recevoir. Fait notable, une autre structure identique a aussi été construite à Hierakonpolis par le même pharaon : toutes deux sont certainement liées. D’ailleurs, la pyramide à degré construite à Saqqarah est aussi accompagnée d’un enclose similaire qui pourrait expliquer leur réelle signification.

 

Sur l’actualité archéologique récente du site d’Abydos :

Plus de 120 gravures de navires près du complexe funéraire du pharaon Sésostris III à Abydos (novembre 2016).

Une cité et un cimetière prédynastiques ont été découverts à Abydos (décembre 2016).

Des fouilles illégales à Abydos en Egypte livrent un relief vieux de 2300 ans inscrit au nom du pharaon de la XXXe dynastie Nectanébo II (mai 2017).

Découverte du dépôt de fondation du temple-cénotaphe de Ramsès II à Abydos (avril 2020).

Outre les vestiges d’Abydos, l’Egypte compte un grand nombre d’autres sites archéologiques reflétant la richesse de son histoire millénaires. Découvrez-les ici !

 

Retour vers la page d’accueil


Dix grandes découvertes archéologiques en Egypte