Rare mosaïque romaine représentant une course de char découverte à Chypre
C’est à une vingtaine de kilomètres à l’est de la capitale chypriote, Nicosie, que les archéologues ont découvert une grande mosaïque quasiment intacte. Sa taille et sa magnificence rappellent la prospérité de l’île à l’époque romaine, tandis que son thème, l’hippodrome et les courses de char, illustrent un aspect important de la culture antique.
Une mosaïque rare et remarquablement préservée.
Le village d’Akaki se trouvait dans l’antiquité à une quinzaine de kilomètres de deux agglomérations antiques : Tamassos et Ledra (aujourd’hui Nicosie). Déjà dans les années 30, un fermier avait mis à jour des fragments de mosaïque sur le site. Mais de véritables fouilles archéologiques n’ont commencé qu’en 2013, sous la direction de Fryni Hadjichristofi. En 2016, une mosaïque remarquable est découverte sous le tracé d’une ancienne voie de chemin de fer. Recouverte pour la protéger, elle est en cours de dégagement depuis un mois. Les travaux de restauration devraient s’étaler sur une longue période et la mosaïque ne sera visible au public que dans plusieurs années.
Remontant au IVe siècle, elle devait constituer la pièce maîtresse de la villa d’un personnage fortuné de l’époque romaine. Mesurant 11 mètres sur 4, elle représente une course de char, un divertissement populaire à l’époque romaine, agrémentée d’inscriptions en grec, désignant peut-être les différentes factions en lice. Si la représentation de chevaux ou de chars isolés n’est pas rare, celle d’un hippodrome et de courses de char est beaucoup plus rare. Unique à Chypre, on n’en connaît que neuf exemplaires dans tout le monde romain.
Découvrez la beauté de cette mosaïque dans cette vidéo.
Courses équestres et hippodromes dans le monde antique.
Les courses équestres et les courses de char constituent pourtant un aspect culturel majeur du monde antique. Bien que dans la culture moderne, on associe surtout de tels événements à l’époque romaine – les péplums comme Ben-Hur et sa fameuse course de char y ont largement contribué – c’est surtout dans le monde grec que se sont ancrées de telles pratiques.
Les courses de char font leur apparition dès le VIIe siècle avant notre ère, et constituent rapidement dès -680 une épreuve prisée des jeux olympiques. En -408, les courses de char à deux chevaux sont introduites. La popularité de tels événements n’est pas limitée à ces occasions exceptionnelles. De nombreuses villes se dotent d’hippodromes, et la popularité de telles épreuves ne se démentent pas durant l’époque hellénistique. A cette époque, Chypre appartient aux Ptolémée et Alexandrie est un grand centre de course équestre. Il semble que dès cette époque, certaines cités chypriotes comme Salamis aient construits des équipements similaires.
Rome n’ont plus n’est pas insensible aux courses de char. Les origines du Circus Maximus, à Rome, remonteraient au VIIe siècle avant notre ère. Alors que Rome domine la Méditerranée, les cités chypriotes de Kyrenia et de Kourion possèdent aussi leurs hippodromes. Cette popularité se poursuit à l’époque byzantine : l’hippodrome de Constantinople joue un rôle important dans la glorification du pouvoir impérial et accueille des courses jusqu’à la prise de la ville lors de la IVe croisade en 1204.
Chypre, une île prospère à l’époque romaine.
La magnificence de la décoration de cette villa romaine illustre également la prospérité de l’île à cette époque. L’île est annexée par Rome en -58. Comme dans tout l’Orient, la langue vernaculaire et l’influence culturelle sont grecques. Grand centre de production du cuivre, l’île reste relativement prospère durant toute la période romaine, sans pour autant être épargnée par des événements tragiques.
La destruction de Jérusalem en 70 entraîne l’exil de nombreux Juifs, dont beaucoup viennent s’installer à Chypre. En 116, ils se révoltent brutalement contre les Romains à Salamis, et l’insurrection est matée dans le sang. Au IVe siècle, à l’époque où est réalisée la mosaïque, Chypre est aussi frappée par une série de séismes : en 332-333, en 342 puis en 365. La plupart des villes chypriotes sont alors dévastées, tandis que commence l’ère byzantine.