Découverte archéologiqueEgypte ancienne

Deux énormes sphynx trouvés dans le temple funéraire d’Amenhotep III

Pour assurer leur survie dans l’au-delà, les pharaons du Nouvel Empire portaient un soin particulier à deux choses : faire construire leur tombe dans la vallée des Rois, et faire édifier un temple funéraire, ou temple des millions d’années non loin de là, sur la rive ouest du Nil, face à Thèbes. Amenhotep (ou Aménophis) III règne entre -1391 et -1353. Sous ce pharaon de la XVIIIe dynastie (à laquelle appartiennent aussi Akhénaton et Toutankhamon), l’Egypte connaît une période de paix et de prospérité, qui permet au souverain de faire édifier un gigantesque complexe funéraire, le plus grand de son temps : l’Aménophium. Le temple, outre son sanctuaire principal consacré à Amon-Rê, comprenait d’autres sanctuaires dédiés à des divinités mineures, des jardins, des bassins, des ateliers, des entrepôts, des quartiers résidentiels et des bâtiments administratifs, le tout enfermé dans une enceinte protégeant une superficie presqu’aussi grande que la cité du Vatican.

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Las! Un séisme le met à bas vers -1200. Puis une grande partie des matériaux du temple détruits sont réaffectés aux projets de construction du pharaon Merenptah. Les vestiges restés sur place, situés trop près du Nil, sont rapidement encore plus dégradés par ses crues. Dès l’Antiquité, il ne reste presque plus rien du gigantesque complexe, sinon les colosses de Memnon, renommés durant l’Antiquité pour émettre à l’aube des sortes de chants. Mais la donne change avec les fouilles débutées dans les années 90, puis avec le projet de conservation du temple d’Amenhotep III et des colosses de Memnon, mission égypto-allemande lancée depuis 1998, et dont la mission, selon les mots de son chef Horig Sorosian, est « de documenter, réassembler et restaurer progressivement les derniers vestiges de ce temple, puis d’exposer les vestiges monumentaux à leur place d’origine ». Et effectivement, de nombreuses études et découvertes remarquables, comme celle d’une colossale statue en quartzite, aujourd’hui visible sur le site, sont venues enrichir notre connaissance de cet énorme édifice disparu.

Dernière découverte archéologique en date : des fragments de deux énormes sphynx. Les deux sculptures en calcaire devaient mesurer chacune près de huit mètres de long et représentent le visage du pharaon Amenhotep associé à un corps de lion (comme le plus célèbre des sphynx, celui de Guizeh ; cependant les corps d’autres animaux pouvaient aussi être figurés). Le nettoyage et la consolidation des statues a par ailleurs révélé l’inscription « le bien-aimé d’Amon-Rê » sur la poitrine de l’une des sculptures.

Le visage d’un des sphynx, auquel les balafres laissées par l’érosion ont fait un curieux sourire. Il représente le pharaon Amenhotep III, portant la coiffe rayée dite Némès, une barbe postiche et un large collier.

Les fragments ont été retrouvés à l’arrière de la porte du troisième pylône, a moitié immergés dans l’eau. Or leur découverte à cette endroit confirme pour les chercheurs leur lien avec la Fête de la Belle Vallée : les deux sphynx gardaient de fait le début de la route processionnelle utilisée lors de cette fête, dont l’origine remonte au Moyen Empire, et qui avait lieu chaque année pour célébrer les défunts. Ce festival débutait par une grande procession, un événement joyeux et festif pour la population thébaine, et qui durait plusieurs jours. La procession se dirigeait vers le temple des millions d’années, où les participants portaient des offrandes aux dieux. On mettait aussi des fleurs dans le Nil que l’on récupérait plus tard pour les déposer près des tombes des défunts.

D’autres éléments retrouvés lors des dernières recherches méritent également d’être mentionnés : trois bustes en granit, presque intacts, de la déesse de la guerre Sekhmet, représentée sous la forme d’un lion, un motif très fréquent dans l’Aménophium, comme l’illustre déjà la découverte antérieure de 27 statues de cette même déesse sur le site. Les vestiges d’une grande salle aux piliers en grès ont aussi été fouillés, dans laquelle sont représentées des images de la Fête Seb, la fête de jubilé qui reconnaissait le droit du pharaon à régner. Cette fête, dont l’origine paraît remonter aux débuts de la période pharaonique, était traditionnellement célébrée lorsqu’un souverain atteignait la trentième année de règne, puis tous les trois ans par la suite. Elle reconnaissait et réaffirmait le droit du pharaon à régner, et devait le revigorer et célébrer son succès et son endurance.

Amenhotep III, dont la durée du règne est encore débattue, mais qui aurait été d’au moins 38 ans, aurait donc célébré plusieurs fois cette fête immortalisée dans les bas-reliefs d’une salle de son temple funéraire.

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