Opulente villa patricienne gallo-romaine en cours de fouilles à Auch
Une fouille préventive est actuellement effectuée à Auch sur une parcelle de 800 m², rue Augusta, qui a déjà révélé les ruines opulentes d’une villa patricienne gallo-romaine. Datée du IIIe siècle de notre ère, elle révèle la prospérité de la cité au Bas-Empire et se révèle d’autant plus importante que le passé gallo-romain d’Auch reste en grande partie méconnu, les fouilles antérieures ayant été peu nombreuses et de faible ampleur.
Elimberris, une cité majeure de l’Aquitaine gallo-romaine.
La ville antique est implantée sur la rive droite du Gers, dans un espace dégagé. Il s’agit déjà du site de la cité gauloise. Eliberre, signifiant « ville neuve » est en effet le chef-lieu des Ausci, un des grands peuples aquitains, et couvre alors environ 25 hectares.
Dans un premier temps, la conquête romaine ne semble pas modifier la structure de la ville. Mais au début du Ier siècle, Elimberris, située au carrefour de deux voies importantes, s’étend vers le Gers et se romanise. Un quadrillage urbain est mis en place, et les méthodes de constructions changent : on emploie partiellement la pierre, et les sols sont recouvert de mortier. Dans la seconde moitié du Ier siècle, il semble que la ville soit aussi dotée d’un forum et peut-être de thermes. Elle devient l’une des plus grandes villes d’Aquitaine, voire de toute la Gaule.
Au Bas-Empire, la ville semble toujours assez prospère et de luxueuses résidences y sont aménagées, comme celle que les fouilles sont en train de mettre à jour. Cependant vers 360, le forum est abandonné. Puis, au cours du Ve siècle, le reste de l’agglomération l’est à son tour. Sans que l’on sache exactement comment se déroule cette évolution, les habitants délaissent la cité antique, trop vulnérable, au profit de la colline située de l’autre côté de la rivière. C’est là que la ville médiévale va se développer autour de sa cathédrale, et à l’abri de remparts dont ne disposait pas la cité antique.
Une villa patricienne du IIIe siècle de notre ère.
Située à moins d’une centaine de mètre du forum d’Elimberris, et probablement encadrée par deux rues, la domus en cours de fouilles occupait une position privilégiée au sein de la cité antique. L’INRAP, chargée des fouilles préventives d’une parcelle de 800 m² avant la construction d’une maison individuelle, est à l’origine de la découverte de cette opulente villa, dont les traces avaient été repérées en 2012 lors d’un diagnostic.
«On sait avec certitude que nous ne dégageons là que l’angle nord-est du bâtiment» a déclaré Pascal Lotti, en charge des fouilles. «La bâtisse pouvait être beaucoup plus grande. Elle l’est probablement, mais le reste se trouve sous d’autres maisons !»
Les archéologues ont déjà mis en lumière que l’édifice, construit au cours du IIIe siècle avait connu deux profondes restructurations au cours de son existence. Au cours de la dernière, réalisée dans les années 320-330, un ensemble thermal a été ajouté à la villa.
«On a trouvé, sur les huit pièces dégagées, un ensemble balnéaire : des thermes privés. C’est très rare, et la marque d’une grande richesse du propriétaire des lieux.»
Une richesse qui paraît aussi dans les matériaux retrouvés sur le site : débris de marbre, traces de mosaïques murales en pâte de verre – très coûteuses à l’époque – et trois mosaïques de grande taille.
Mais à la fin du IVe ou au début du Ve siècle, la villa est abandonnée. A cette époque, la situation en Gaule devient instable : de nombreux peuples germaniques – Alains, Suèves, Vandales – ont franchi le Rhin en 406-407 et ravagent la contrée dans les années suivantes, avant que les Wisigoths ne finissent par se fixer en Aquitaine. Suite à cet abandon, la villa est alors soumise à la récupération systématique de ses matériaux : les pierres des murs, les dallages de marbre et les carreaux de chauffage sont ainsi prélevés pour être réemployés dans la construction d’autres édifices.
Trois mosaïques de style aquitain.
C’est la découverte la plus frappante réalisée par les archéologues pour le moment. Dans le corps de bâtiment de grandes proportions (28 mètres sur 10 de large) qu’il fouilles, ils ont retrouvé trois pièces chauffées par hypocauste, dont le sol est revêtu de mosaïques polychromes différentes. Deux des mosaïques présentent des figures géométriques, tandis que la troisième, la plus grande, est constituée d’un tapis complexe de motifs géométriques et floraux. Au total, les parties dégagées couvrent entre 70 et 80 m², une surface remarquable en milieu urbain.
Ces mosaïques sont d’un style « aquitain », qui apparaît à la fin de l’antiquité dans le sud-ouest de la Gaule et dont de nombreux exemples ont été retrouvés dans les grandes villas rurales. Il semble avoir été moins répandu en milieu urbain, même si de tels pavements ont été retrouvés à Bordeaux ou à Eauze, deux autres centres majeurs de l’Aquitaine romaine. Les mosaïques ont cependant été amputées à la fin de l’antiquité par la récupération des carreaux de chauffage qui les a endommagé.
Les archéologues prévoient de les prélever et de les restaurer, afin qu’elles puissent être présentées au public. Leur enlèvement leur permettra aussi d’accéder aux couches de fouilles plus anciennes, et de plonger dans l’histoire de la ville romaine du IIe et du Ier siècle de notre ère. Puis les trous seront bouchées, le terrain rendu à son propriétaire et la construction de la maison prévue aura lieu.
il est dommage que le site en l’état ne soit pas conservé pour présentation in situ, j’espère qu’il serra scanné pour une reconstitution informatique.