Plaque en os sculpté byzantine montrant un guerrier trouvée à Suzdal en Russie
Des archéologues de l’Institut d’archéologie de l’Académie des sciences de Russie ont mis au jour une rare plaque d’os byzantine dans l’enceinte historique de Suzdal, une ville de Russie.
Suzdal, l’une des plus anciennes villes russes.
Suzdal date de 999 ou 1024. En 1125, elle devint la capitale de la principauté de Rostov-Souzdal jusqu’en 1157, date à laquelle la capitale est déplacée à Vladimir. Suzdal reste néanmoins un centre politique et religieux important de la principauté. La ville est pillée et brûlée en 1237 lors des invasions mongoles. Cependant, elle reste un centre commercial grâce à sa situation dans une région fertile. La ville est annexée par la principauté de Moscou en 1392 et entre dans une période de déclin jusqu’au XVIe siècle. De son riche passé, Suzdal a conservé de nombreux monuments historiques, dont un Kremlin, les remparts de la ville et de nombreux édifices religieux anciens.
Son sous-sol recèle également des trésors. Les dernières fouilles de vestiges d’habitations datant du XIIe au XIVe siècle ont fourni des artefacts. Parmi eux, des croix en pierre, un encolpion (médaillon porté par les évêques orthodoxes et catholiques orientaux), un récipient en verre avec une peinture émaillée, une clé en fer et des sceaux de type Drahičyn provenant de la région de Brest en Biélorussie. Mais la découverte la plus marquante est celle de la plaque en os byzantine, témoignant à la fois de l’influence culturelle et artistique de Byzance bien au-delà de ses frontières, et des routes commerciales menant à Suzdal.
Une plaque en os sculptée provenant d’un coffret byzantin.
Cette plaque en os, sculptée de façon complexe, mesure 45 x 46 mm. Elle est gravée d’une représentation détaillée d’un guerrier à demi nu. L’homme brandit une épée et un bouclier, et son visage est orné de traits fins et de cheveux flottants.
À l’origine, ce type de recouvrement était réalisé dans des matériaux rares comme l’ivoire, mais à partir du XIIe siècle, les artisans byzantins ont commencé à utiliser des os d’animaux domestiques ou sauvages. Ce changement reflète probablement l’orientation plus large du marché ou le travail des ateliers provinciaux à la périphérie de l’empire.
La plaque comporte six trous de fixation asymétriques autour de son bord extérieur surélevé. Les archéologues pensent donc qu’il s’agit d’un revêtement décoratif provenant d’un coffret. La plaque daterait d’une période comprise entre le Xe et le XIIe siècle. À cette époque, ce type de coffret était souvent réalisé par des artisans de Chersonèse, une important cité grecque et byzantine située en Crimée, ou de Constantinople. Ils étaient fabriqués en bois et ornés de petites plaques d’os, comme celle-ci, fixées à l’aide de clous ou d’épingles en os.
Une découverte rare et remarquable.
La découverte est particulièrement remarquable à plusieurs niveaux. D’abord, elle souligne l’apogée du commerce international et des échanges culturels dans le nord-est de la Russie au cours du XIIe siècle et au début du XIIIe siècle. Ces processus se reflètent dans diverses catégories d’articles importés et dans des pièces uniques d’artisanat artistique, que l’on rencontre rarement dans les recherches archéologiques.
C’est aussi un bel exemple d’art séculier byzantin, dont un nombre d’exemples relativement réduit – en comparaison de l’art sacré – nous est parvenu. La plaque en os de Suzdal, avec sa sculpture habile, son exécution détaillée et sa représentation d’un guerrier en pleine attaque, témoigne de la maîtrise des artisans byzantins.
Les plaques d’os provenant de boîtes décorées de reliefs artistiques sont extrêmement rares et précieuses sur le territoire de la Rus’ ancienne. »
Institut d’archéologie de l’Académie des sciences de Russie
Des analogies directes avec la plaque de Souzdal peuvent être trouvées dans l’art byzantin, comme les plaques latérales des cercueils des collections du musée national de l’Ermitage et de la réserve du musée de Novgorod. Cependant, contrairement à la plaque de Souzdal, ces exemples sont en ivoire. La question de savoir si la plaque a été produite dans un atelier constantinopolitain ou dans un atelier provincial sur la base d’un modèle est un sujet de recherche futur.
Crédits photographiques : Russian Academy of Sciences
Source (en anglais) à retrouver ici.