Plaque de guerriers de la civilisation ibérique de Tartessos trouvée à Guareña
Des archéologues de l’Institut d’archéologie de Mérida (IAM) et du CSIC ont découvert une plaque d’ardoise représentant des scènes guerrières sur le site archéologique de Casas del Turuñuelo.
La culture de Tartessos.
La civilisation tartessienne est une civilisation antique qui s’est épanouie dans le sud de la péninsule ibérique, dans la région de l’Andalousie actuelle, entre le VIIIe et le VIe siècle avant notre ère. Encore assez mal connue, connue par les sources grecques qui lui ont donné son nom, sa compréhension dépend entièrement des découvertes archéologiques. L’origine de ce peuple reste encore mystérieuse, mais il pourrait être issu d’une fusion entre les populations locales et des colons venus de la Méditerranée orientale. La culture de Tartessos a connu son apogée entre le VIIe et le VIe siècle avant notre ère, grâce au commerce avec les Phéniciens et les Grecs. Elle disparaît assez subitement aux alentours de -500, probablement en raison de l’invasion des peuples celtes venus du nord.
L’organisation territoriale de la culture de Tartessos était centrée autour de plusieurs cités importantes. Aujourd’hui, les sites archéologiques qui nous permettent d’appréhender cette culture sont le Cerro del Buenavista à Huelva, le Carambolo à Séville ou encore le Cancho Roano à Zalamea de la Serena. Les bâtiments qui s’y trouvaient étaient généralement construits en pierre et en brique crue, et comprenaient des habitations, des temples, des ateliers et des fortifications. Les temples étaient souvent décorés de sculptures et de peintures murales représentant des divinités et des scènes mythologiques.
La civilisation de Tartessos a laissé de nombreux témoignages de sa culture, notamment dans les domaines de la langue et de l’écriture, de la religion, de l’art et de la société. Les inscriptions retrouvées sur les sites archéologiques témoignent de l’utilisation d’une langue et d’une écriture propre à cette culture, encore largement méconnues des spécialistes. La religion de Tartessos était polythéiste et vouait un culte à de nombreuses divinités, telles que la déesse Astarté ou le dieu Melqart. L’art de Tartessos se caractérise par des objets en métal précieux, tels que des bijoux et des armes, ainsi que par des céramiques finement décorées. La société de Tartessos était organisée en castes, avec une élite dirigeante composée de guerriers et de prêtres, et une population majoritairement composée d’agriculteurs et d’artisans. L’économie de Tartessos reposait sur l’agriculture, l’élevage, la pêche et le commerce, notamment avec les Phéniciens et les Grecs.
Le site de Casas del Turuñuelo à Guareña.
Casas del Turuñuelo est un établissement et un centre cérémoniel associé à la culture Tartessos. Le peuple tartessien a habité certaines parties du sud de la péninsule ibérique et se caractérise par un mélange de traits paléo-hispaniques locaux et phéniciens. Cette culture est aussi connue pour ses compétences avancées en matière de métallurgie et de travail du métal, ayant laissé des objets ornés et des éléments décoratifs.
Le site archéologique d’El Turuñuelo, situé dans la vallée du Guadiana en Espagne, a été découvert dans les années 1990. Des fouilles ont été menées sur le site depuis 2014, permettant de mieux comprendre la culture tartessienne, dont le peuple habitait la région il y a plus de 2 500 ans. Le site d’El Turuñuelo a une superficie d’un hectare et a été fouillé à environ 10% lors des trois campagnes.
En 2015, une première campagne de fouilles a livré les vestiges spectaculaires d’ue autel en forme de pied de taureau, de bancs et d’une baignoire de 1,70m. En 2017, les archéologues ont trouvé un petit escalier de 10 marches et 2,5 mètres de hauteur qui reliait deux étages, ainsi que les restes de 19 chevaux, deux taureaux et un porc. Les archéologues pensent que ces animaux ont été sacrifiés dans le cadre d’un rituel. Depuis 2022, les fouilles ont repris sur le site.
Comme dans d’autres sites de la culture de Tartessos, les habitants d’El Turuñuelo semblent avoir eux-mêmes détruits, incendiés et scellés avec de l’argile leurs propres habitants à la fin du Ve siècle avant notre ère, probablement face à l’invasion imminente de peuples celtes venus du nord. Cela a souvent permis de bien conserver les vestiges.
La découverte d’une plaque gravée montrant des scènes guerrières.
Les fouilles de ces dernières années se poursuivent et mettent au jour les éléments architecturaux d’un bâtiment monumental, composé de plusieurs pièces et étages. Quatre salles ont été fouillées jusqu’à présent, révélant des objets liés à la production artisanale, notamment des outils en fer, des céramiques avec des décorations incisées, de petits récipients et des poids de métier à tisser en cours de fabrication. En 2023, les archéologues avaient fait la découverte remarquable des premières représentations humaines connues de la culture de Tartessos.
La découverte récente d’une plaque d’ardoise gravée de scènes guerrières, de figures géométriques et de visages humains vient s’y ajouter. Les archéologues suggèrent qu’il s’agit d’une ardoise d’orfèvre, utilisée pour s’exercer et reproduire des motifs avant de les graver sur des matériaux plus précieux tels que l’or ou l’ivoire. Ces représentations contribuent à enrichir nos connaissances sur les vêtements, les armes et les coiffes des Tartessiens.
Cette découverte représente un exemple unique dans l’archéologie de la péninsule et nous rapproche de la connaissance des processus artisanaux à Tartessos. »
Esther Rodríguez, Conseil supérieur de la recherche scientifique
Crédit photographique de couverture : CSIC
Sources (en espagnol) : Conseil Supérieur de la recherche scientifique espagnol
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