Découverte archéologiqueEgypte ancienne

Plus de 800 tombes découvertes près d’une pyramide du Moyen-Empire

Une vaste nécropole vieille d’environ 4000 ans a été mise au jour sur le site de Licht, près de la région du Fayoum, à environ 60 km au sud du Caire. Cette découverte, annoncée début septembre 2018 par le ministère des Antiquités égyptiennes, est intervenue sur un site majeur du Moyen-Empire égyptien (-2033 à -1786).

Itjtawy, capitale perdue du Moyen-Empire.

La capitale de la XIe dynastie, première dynastie du Moyen-Empire, se situait à Thèbes, en Haute-Egypte. Mais après s’être emparé du pouvoir, le premier pharaon de la XIIe dynastie, Amenemhat Ier (-1991 à -1962), décide de déplacer le centre du pouvoir beaucoup plus au nord.

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Bas-relief provenant du temple funéraire d’Amenemhat Ier, montrant le pharaon entouré de plusieurs divinités dont Horus et Anubis.

C’est près de la région du Fayoum, à une cinquantaine de km au sud de Memphis, qu’il fait construire une nouvelle cité royale : Amenemhat-itj-tawy, signifiant « Amenemhat (celui qui) s’empare des Deux Terres ».

carte-egypte-moyen-empire-fayoumPlusieurs raisons ont pu présider à ce choix : la situation géographique de la nouvelle cité près des bouches du Fayoum permettait de contrôler facilement la Haute et la Basse-Egypte, et se situait par ailleurs non loin de la source des invasions asiatiques qui menaçaient l’Egypte à cette époque. Un autre objectif était probablement aussi de valoriser et mettre en culture les territoires du Fayoum.

Toujours est-il que le site de cette cité royale, capitale de la XIIe dynastie, n’a à ce jour toujours pas été identifié avec certitude. En revanche, on connaît l’emplacement de sa nécropole, située près du village d’el-Licht, où deux pharaons ont fait édifier leur sépulture. La plupart des chercheurs s’accordent à penser qu’Itjtawy ne devait pas être très éloignée de cette nécropole.

Licht, nécropole royale de la XIIe dynastie.

Lorsqu’il fait construire sa nouvelle capitale, Amenemhat Ier se préoccupe aussi de son devenir dans l’au-delà. Il choisit le site d’el-Licht pour accueillir sa sépulture. Son fils Sésostris Ier (-1962 à -1928) l’imite, et ces deux pharaons font édifier chacun un complexe funéraire monumental assorti d’une pyramide, haute de 55 mètres pour Amenemhat et de 61 pour Sésostris.

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Vue de la pyramide d’Amenemhat Ier à Licht.

Les vestiges de la première mesurent encore environ 20 mètres, tandis que la seconde est aujourd’hui réduite à ses fondations. En revanche, le temple funéraire de Sésostris est mieux conservé que celui de son père. Autour de ces deux complexes, des tombes furent aménagés pour la famille des pharaons et leurs serviteurs, mais l’ensemble de la nécropole semble être tombée en désuétude après la chute de la dynastie, vers -1780, et la plupart de ses tombes furent pillées dès l’antiquité.

Fouillé d’abord par des Français entre 1882 et 1885, le site a été dès le début du XXe siècle principalement exploré par le Metropolitan Museum of Art de New-York.

Licht, une nécropole encore méconnue.

Même si le site de Licht a été fouillé depuis la fin du XIXe siècle, les archéologues américains du XXe siècle se sont principalement consacrés à cartographier et explorer les deux pyramides et la zone environnante. Kathryn Bard, archéologue de l’université de Boston, qui participe aux recherches, explique que : « on ne connaît pas vraiment beaucoup de tombe dans cette zone, à l’exception des tombes royales qui s’y situent ».

Le reste du site reste donc largement inexploré. Or en 2014, en travaillant sur des images satellites à haute résolution, l’égyptologue Sarah Parcak et ses collègues de l’université de Birmingham en Alabama constatent l’existence de fosses de pillage à environ 300 mètres au nord-est de la pyramide de Sésostris Ier. En étudiant les images de plus près, ils se rendent compte que ces fosses se sont multipliées entre 2009 et 2013, suivant la récession économique que l’Egypte a connu en 2009 et les troubles politiques de 2011.

Cependant, il était difficile de savoir où menaient ces trous depuis le ciel. C’est en effectuant des travaux au sol que les archéologues ont pu confirmer que la plupart de ces fosses menaient bien à des tombes. Celles-ci ont déjà été largement pillées, mais la zone révèle une nécropole immense, comptant des centaines de tombes.

Une des plus vastes nécropoles connues du Moyen Empire.

Depuis la campagne de 2017, pas moins de 802 sépultures, jusqu’alors toutes inconnues, ont été recensées et cartographiées. Elles constituent un entrelacs complexe de tombes imbriquées les unes dans les autres. La plupart d’entre elles étaient collectives et comprenaient des espaces permettant d’accueillir jusqu’à huit dépouilles, ce qui signifie que la nécropole aurait pu abriter les corps d’au moins 4000 individus.

« Ils ont utilisé tout l’espace auquel ils pouvaient accéder » explique Sarah Parcak. « Beaucoup de tombes ont été réutilisés par les familles ou les petits-enfants, arrières petits-enfants ou lointains cousins ».

Sur chaque site, l’équipe a documenté avec minutie les tombes, collecté des images et des coordonnées GPS afin de constituer une base de donnée couvrant toute la zone.

« Ce que nous avons sur ce site est l’un des corpus les plus importants de tombes du Moyen-Empire de toute l’Egypte », s’enthousiasme Sarah Parcak.

Et il est probable que, même si les tombes ont été pillées, elles livreront de nombreuses informations sur la vie des gens qui y ont été enterrés il y a 4000 ans, et qui vivaient probablement dans la capitale royale perdue de Itjtawy…

 

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