L’imagerie satellite permet d’identifier 1249 pukaras, des forteresses des hauts plateaux andins
Les hauts plateaux andins du Pérou abritent de nombreux vestiges de forteresses anciennes, appelées pukaras, qui témoignent d’un passé marqué par les conflits et les luttes de pouvoir. Une nouvelle étude a permis de repérer un grand nombre d’entre eux, apportant de nouveaux éléments pour la compréhension de ce phénomène.
Les pukaras, les forteresses des hauts plateaux andins.
Dans les Andes, les pukaras sont des forteresses construites sur des collines et des crêtes, protégées par des murs, des fossés et des barrières naturelles. « Pukara » signifie d’ailleurs « forteresse » en quechua et en aymara, les deux principales langues parlées dans les hauts plateaux andins. Ces sites défensifs sont courants dans ces régions montagneuses et sont généralement attribués à la période intermédiaire tardive (1000 à 1450 de notre ère), avec quelques exemples remontant à des époques antérieures et postérieures.
Bien que les pukaras soient principalement conçus pour la défense, ils varient en matière de taille, de mode d’occupation et de méthodes de fortification. Jusqu’à présent, les chercheurs se sont plutôt concentrés sur les grands pukaras résidentiels, négligeant souvent les « refuges » non résidentiels, qui sont pourtant une composante majeure de ce phénomène.
La multiplication des pukaras durant cette période aurait eu pour cause les conflits qui marquent la période intermédiaire tardive. Cette période voit en effet la désintégration des grands Etats de Huari et de Tiwanaku. Les conflits à différentes échelles ont probablement contribué à la formation de confédérations régionales, renforcées par l’expansion militariste inca au XIVe siècle. Ceux-ci s’affirment en effet à ce moment comme la puissance montante dans la région, et finissent par constituer l’un des plus grands empires du monde avant l’arrivée des Conquistadors. Ces processus sociaux coïncident avec une phase prolongée d’aridité et de volatilité climatique, qui a probablement exacerbé les tensions. Cependant, les différences régionales suggèrent que les trajectoires sociopolitiques des différents peuples ayant construit les pukaras sont divers.
1249 pukaras identifiés par imagerie satellite.
Les auteurs de l’étude ont utilisé les résultats de trois projets complémentaires d’étude systématique par satellite, complétés par des vérifications ciblées au sol et des recherches antérieures sur le terrain, afin d’obtenir de nouvelles informations sur le phénomène des pukaras. La zone d’étude couvrait une surface gigantesque : 151103 km2 des hauts plateaux des Andes méridionales. Au final, ce sont 1249 pukaras qui ont été identifiés dans l’imagerie satellite.
Les résultats ont apporté deux constatations intéressantes, qui permettront d’affiner la compréhension du phénomène des pukaras. La première, numérique. Si 682 pukaras étaient résidentiels, 567 ne l’étaient pas. Ce nombre à peine inférieur montre que les « pukaras-refuges » étaient étonnamment fréquents, même si leur étude a jusqu’alors été largement négligée.
La deuxième constatation concerne la densité de construction et de distribution des pukaras. Les chercheurs ont montré que les forteresses sont densément concentrés à certains endroits, comme le bassin du lac Titicaca, la vallée de Colca ou certaines parties du centre-sud des Andes. En contradiction avec l’idée reçue que les pukaras avaient exclusivement une vocation défensive, certains ont également été trouvés dans des zones de très haute altitude, et dans des régions où il n’y a pas de formes de terrain défendables.
Ces densités variables soulèvent des questions importantes sur les contextes sociaux, politiques, économiques, géographiques et environnementaux sous-jacents qui ont contribué à la construction de pukaras dans certaines régions, ou au contraire l’ont dissuadé dans d’autres.
Crédit des images: Antiquity
Source de l’étude à trouver ici (en anglais).