Karnak, le gigantesque temple du dieu Amon-Râ à Thèbes
Le temple de Karnak était le principal sanctuaire de la capitale de la Haute-Egypte, Thèbes, qui fut la résidence de nombreux pharaons au Moyen et au Nouvel Empire. Il s’agit en fait d’un gigantesque ensemble de plusieurs temples et de nombreux autres édifices, et constitue l’un des sites archéologiques les plus impressionnants d’Egypte, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO avec d’autres édifices antiques de Thèbes. Aujourd’hui, ses vestiges se situent à environ 2,5 km au nord de la ville moderne de Louxor.
Le nom de Karnak dérive de l’arabe, mais les anciens Egyptiens désignaient généralement le temple sous le nom de Nesut-Tawy, signifiant « Trône des Deux Terres », même si d’autres noms pouvaient aussi être utilisés.
Les origines du temple de Karnak.
Karnak commence à prendre de l’importance il y a environ 4000 ans. A cette époque, l’Egypte connaît la première période intermédiaire, une période de troubles politiques et de morcellement qui suit la fin de l’Ancien Empire. Or les pharaons de la XIe dynastie (-2134 à -1991), originaires de Thèbes, vont parvenir à réunifier la vallée du Nil et ouvrent la période du Moyen Empire. A cette époque, le dieu guerrier Montou est le dieu suprême. Il est révéré à Thèbes, mais aussi à Tôd et dans deux autres sanctuaires de la région thébaine.
Le site de Karnak est alors déjà considéré comme sacré, et il est vraisemblable qu’une structure pour vénérer le dieu Amon s’y trouve déjà. Ce dieu n’est alors qu’une divinité importante, mais dont l’influence reste régionale. Cependant, Amon va progressivement être fusionné avec Râ, le dieu de la cité sacrée du soleil, Héliopolis, pour devenir Amon-Râ. Cette montée en puissance s’accompagne d’une intense activité architecturale à Karnak.
Au Nouvel Empire, Amon-Râ devient le dieu suprême de l’Egypte. Le temple est encore agrandi et devient le plus important sanctuaire du pays, et le plus riche. A tel point que son grand-prêtre fait peut-être de l’ombre au pharaon. Ce serait l’une des raisons qui aurait pu pousser Akhénaton à promouvoir le culte du dieu unique Aton et à construire une nouvelle capitale à Amarna, ou bien encore une des raisons pour lesquelles Ramsès II fonda une nouvelle capitale à Pi-Ramsès, dans le delta du Nil, bien loin de Thèbes.
Toujours est-il que l’importance du sanctuaire ne se dément plus dans l’histoire égyptienne. Une trentaine de pharaons font bâtir à Karnak, jusqu’à l’époque ptolémaïque.
Karnak à son apogée : un gigantesque complexe sacré.
Dans son extension maximale, le temple de Karnak couvre une zone d’environ 100 hectares, soit 1 km². Karnak n’est pas consacré au seul Amon-Râ mais à la triade thébaine : Amon-Râ, son épouse Mout, et leur fils Khonsou. Par ailleurs, d’autres divinités sont aussi vénérés dans le sanctuaire, en particulier le dieu faucon Montou, originaire de la région thébaine et principale divinité de l’Egypte du Moyen Empire avant d’être supplanté par Amon. L’organisation du complexe reflète ceci et Karnak se divise en trois domaines principaux, comprenant chacun un ou plusieurs temples et enfermé dans sa propre enceinte. Chaque temple dispose de chaussées d’accès qui les relient entre eux, ou aux autres grands sanctuaires de Thèbes, notamment le temple de Louxor, situé à 1,5 km plus au sud.. Seul le temple d’Amon-Râ comprend un débarcadère menant devant l’allée des sphynx et son pylône principal.
Le domaine d’Amon.
Bien entendu, il s’agit du plus important des trois. Il est clos par une immense enceinte percée de plusieurs portes, et comprend le gigantesque temple d’Amon, mais aussi une vingtaine d’autres temples et chapelles subalternes, dont les plus importants sont ceux de Khonsou, le fils d’Amon, et d’Opet. L’enceinte enferme également un lac sacré, les habitations des prêtres et des bâtiments administratifs, nécessaires pour administrer le sanctuaire et les vastes biens possédés par le temple à Thèbes et au-delà.
Le noyau du sanctuaire, derrière le cinquième pylône et près du lac sacré, était probablement l’emplacement du site sacré originel de Karnak. Il remonte pour l’essentiel au Moyen Empire. Par la suite, et notamment au Nouvel Empire, le temple va s’étaler dans deux directions : vers le nord-ouest, en direction du seul débarcadère du sanctuaire qui le reliait par un canal au Nil, et vers le sud et le domaine de Mout.
Le domaine de Mout.
Second en importance, il se situait au sud du grand temple d’Amon, auquel il était relié par une chaussée massive flanquée de sphinx à tête de bélier. Le domaine était clos par une enceinte enfermant environ 20 hectares, et comprenait le temple de la déesse proprement dit, un grand lac sacré et plusieurs temples plus petites, notamment celui de Khonsou enfant.
Le temple de Mout a été construit principalement par Aménophis III, mais a également reçu des additions de plusieurs autres pharaons, notamment Taharqa (-690 à -664) de la dynastie koushite, et Nectanebo Ier (-380 à -362) avant J.-C. Il en subsiste les traces d’un large pylône, ouvrant sur une cour étroite, avec un second pylône qui donnait accès à la zone intérieure du sanctuaire. Cependant, les vestiges sont très ruinés et il est difficile de reconstituer précisément le plan du sanctuaire ou sa décoration. A l’époque d’Aménophis III, le temple aurait été décoré de 700 statues de la déesse Sekhmet, tout comme au sanctuaire de l’Amenophium.
Il subsiste aussi des vestiges d’un petit temple élevé sur le bord ouest du lac sacré par Ramsès III, qui conserve encore quelques scènes militaires sur ses murs extérieurs et deux colosses du pharaon sans tête devant son entrée.
Le temple de Khonsou enfant, le seul autre d’une taille importante, a été construit en grande partie en réemployant des blocs d’autres structures du Nouvel Empire. Il conserve une partie de sa décoration, notamment plusieurs représentations de naissance et de circoncision.
Deux autres structures se trouvaient à l’extérieur de l’entrée : à l’est, le temple d’Amon Taureau et un petit reposoir pour barque sacrée, remontant aux règnes d’Hatshepsout et de Thoutmosis III.
Aujourd’hui, le domaine de Mout fait l’objet de recherches et de fouilles continues menées par la musée de Brooklyn et l’Institut des Arts de Détroit.
Le domaine de Montou.
Enfin, le domaine de Montou comprend le temple du dieu et celui d’autres divinités, notamment Maât.
Karnak au Moyen Empire.
Les pharaons de cette période établissent le premier grand temple, qui constituera par la suite le noyau du sanctuaire tout entier. La plus ancienne réalisation subsistante de cette époque est la Chapelle Blanche de Sésostris Ier, ainsi que la cour du Moyen Empire. A l’extérieur du sanctuaire proprement dit, près du Lac Sacré, les archéologues ont aussi retrouvé une zone d’habitation du Moyen Empire, probablement pour les prêtres et le personnel du temple.
Le vestige le plus frappant du Moyen Empire qui nous soit parvenu est probablement la Chapelle Blanche, ou chapelle du jubilé de Sésostris Ier, était un petit édifice construit dans un calcaire très fin et décoré de bas-reliefs de haute qualité, listant notamment tous les nomes d’Egypte et leurs emblèmes, et montrant Sésostris Ier couronné et enlacé par les dieux Amon, Horus, Min et Ptah. Lors de la construction du troisième pylône, au Nouvel Empire, la chapelle fut démantelée et ses matériaux servirent à remblayer l’intérieur du pylône. Entre 1927 et 1930, ses blocs furent retrouvés et soigneusement réassemblés.