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Nouvelles découvertes sur le site d’Ek’ Balam, cité maya du Yucatan

Des archéologues de l’Institut national d’anthropologie et d’histoire (INAH) ont mis au jour des sépultures dans une chambre de stockage de chultun dans la cité maya d’Ek’ Balam. Cette cité ancienne, située à une trentaine de kilomètres au nord de Merida, est longtemps restée oubliée et enfouie dans la jungle du Yucatan.

Carte montrant le site archéologique maya d'Ek' Balam dans le Yucatan

La cité maya d’Ek’ Balam, un site important du Yucatan redécouvert tardivement.

Après la conquête du Mexique par les Espagnols se met en place le système de l’encomienda pour exploiter et évangéliser les nouveaux territoires conquis. Des colons, les encomendero, reçoivent de la couronne des autochtones vivant sur un territoire donné, qui sont obligés de travailler pour eux sans rétribution dans des mines, des champs ou des chantiers de construction. L’un de ces encomenderos, Juan Gutiérrez Picón mentionne le site, et indique que son nom provient d’un grand seigneur nommé Ek Balam ou Coch Cal Balam, qui aurait fondé la cité et l’aurait gouvernée pendant 40 ans. En langue maya, Ek’ Balam signifierait le « jaguar sombre ou noir » ou encore « l’étoile jaguar ».

Mais jusqu’à la fin du XXe siècle, la cité maya d’Ek’ Balam est enfouie dans la jungle. Ce n’est qu’en 1994 que les recherches archéologiques commencent, sous l’égide de l’INAH. Elles se concentrent tout d’abord sur un grand amas de terre d’où émergent des pierres. Les archéologues vont progressivement dégager un immense édifice haut de 31 mètres, très complexe, qu’ils nomment l’acropole. Il comporte des sculptures en stuc, parfois peintes, qui vont livrer des informations importantes sur l’art maya. Son état de préservation est remarquable, et les chercheurs pensent que les habitants d’Ek’ Balam l’ont précipitamment recouvert de terre alors qu’une invasion menaçait leur cité, ce qui explique que le monument ait pu traverser les siècles sans trop subir les affres du temps.

Mais les découvertes ne s’arrêtent pas là. Les archéologues mettent au jour de nombreux monuments du centre cérémoniel d’Ek’ Balam. Celui-ci comprend des sanctuaires sous forme de plateformes et de pyramides, ainsi qu’un terrain pour le jeu de balle, des palais et des parvis. Il couvre une surface d’environ 1 km² protégée par trois murs. L’élite de la cité y résidait et on y accédait par cinq entrées d’où partaient des routes (appelés sacbés) orientées selon les quatre points cardinaux. Le reste de la ville s’étendait par delà sur environ 12 km².


L’histoire d’Ek’ Balam reconstituée grâce à l’archéologie.

Tombe du roi d'Ek' Balam, site archéologique maya du Yucatan
L’entrée de la tombe du roi Ukit Kan Lek Tok et ses remarquables stucs.

En une trentaine d’années de fouilles et de recherches, et avec l’aide des hiéroglyphes retrouvés sur le site, les chercheurs mexicains sont parvenus à retracer partiellement l’histoire de la cité, complètement inconnue jusqu’alors.

L’établissement des Mayas à Ek’ Balam débute probablement vers -300, durant la période du préclassique moyen. Par rapport à d’autres sites, c’est une installation plutôt récentes. D’abord assez modeste, Ek’ Balam s’étend progressivement et devient un grand centre politique, économique et religieux. Au VIIIe siècle, c’est aussi le centre d’un royaume en lutte avec d’autres cités-Etats de la péninsule du Yucatan. Le roi Ukit Kan Lek Tok (770-801), dont les archéologues ont retrouvé la tombe, serait l’artisan de cette montée en puissance et le fondateur de la dynastie locale. Sous son règne, la cité aurait rivalisé en importance avec d’autres cités mayas de premiers plans dans la région comme Cobá, Kulubá et Chichén Itzá où règnent les Itzá, une ethnie maya dont la culture est empreinte d’éléments mexicains. Dans les premières années du IXe siècle, ce sont peut-être eux qui parviennent à soumettre Ek’ Balam à leur domination.

Par la suite, comme beaucoup d’autres cités mayas, la cité est en grand partie abandonnée et ses monuments disparaissent dans la jungle, même si l’occupation humaine perdure par endroit durant la période post-classique.


Les chultuns d’Ek’ Balam et les dernières découvertes.

L’acropole est un espace complexe, qui n’a pas encore livré tous ses secrets. La campagne de fouilles cette année se concentrait sur l’exploration et la consolidation d’une de ses places surélevées du côté est. Dans cette zone, neuf pièces d’habitation réservés à l’élite ont été découverts. Ils comportaient des reliefs en stuc représentant des ravisseurs et des captifs, des masques, des nattes. Les chercheurs ont aussi retrouvé des peintures murales partiellement préservées.

Aux deux extrémités sud et nord de cette zone d’habitation, deux chultuns, qui y étaient associés, ont été découverts. Les chultuns étaient des chambres souterraines en forme de cloche, avec une petite entrée en surface et un espace s’évasant à l’intérieur. Ils servaient à stocker de la nourriture ou de l’eau. Ils présentent un diamètre moyen d’un peu plus de 2 mètres et une profondeur de presque 3 mètres. L’entrée n’est large que d’une cinquantaine de centimètres.

L’un de ces espaces a été plus tard transformé en espace rituel et dépôt mortuaire. Les archéologues ont enlevé une couche de terre, de gravats et de pierre et sont tombés sur une petite pierre cylindrique, en forme d’autel. Sur sa partie supérieure ont été retrouvés des fragments de céramiques et d’obsidienne. Par ailleurs, les chercheurs ont retrouvé les restes humains de deux individus.

Du premier ne restaient que quelques ossements disloqués et mélangés au remblai : un fémur, un humérus, une partie de mandibule et d’autres fragments mal conservés et inidentifiables. La taille et robustesse du fémur laisse penser qu’il s’agissait d’un homme adulte. Le squelette de la seconde personne était mieux préservé. Déposé face contre terre, directement sur la surface du sol du chultun et recouvert d’une couche de terre, il appartient à une femme adulte, qui mesurait environ 1 mètre 40.

Les chercheurs mexicains prévoient de mener des recherches complémentaires pour connaître plus en détail les caractéristiques des deux individu, et la séquence d’occupation du site funéraire.

Chultun transformé en sépulture dans l'acropole d'Ek Balam, site archéologique maya du Yucatan.
La pierre circulaire et les reste humains dans le second chultun

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