Mosaïque de Méduse dévoilée par les archéologues espagnols à Mérida
Augusta Emerita, aujourd’hui connue sous le nom de Mérida, était une des plus grandes villes de la partie occidentale de l’empire romain, fondée en 25 avant notre ère par l’empereur Auguste. De nombreux monuments antiques ont survécu, et le potentiel archéologique énorme de la ville est exploité depuis plusieurs décennies par les archéologues espagnols. La récente découverte de thermes près du théâtre romain illustre ces travaux de recherches.
Est venue s’y ajouter une nouvelle trouvaille, dans une autre partie de la ville : celle d’une mosaïque romaine bien conservée, dont l’élément central figure une tête de Méduse, fameux monstre de la mythologie gréco-romaine.
Augusta Emerita, une colonie romaine majeure d’Hispanie.
La colonie, occupant une position stratégique au carrefour de plusieurs routes importantes la reliant à Lisbonne, Séville, Cordoue et Tolède, et proche de la rivière Guadiana, devient vite prospère. Vers – 15, elle devient la capitale de la nouvelle province de Lusitanie, puis jusqu’au IIIe siècle celle du diocèse d’Hispanie. Elle est dotée de monuments publics témoignant de son rayonnement comme centre culturel, économique, militaire et administratif. Elle compte ainsi plusieurs ponts, trois aqueducs, deux forums, des temples, un théâtre, un cirque et un amphithéâtre inauguré en -8. Son importance était telle qu’Ausone, un homme politique et lettré gallo-romain originaire de la région bordelaise, la classait au neuvième rang des villes les plus importantes de l’empire, devant Athènes.
Passée cette période, la ville suit le destin du reste de la péninsule et souffre des incursions des peuples germaniques qui envahissent l’Hispanie à partir de 409 : Vandales, Alains, Suèves, dont le roi Rechila meurt d’ailleurs dans la ville en 448. Puis arrivent les Wisigoths, qui en font même un temps leur capitale, avant de la transférer à Tolède. Lors de l’invasion arabe, c’est aussi à Mérida qu’Egilona, la dernière reine des Wisigoths, est capturée en 711. La ville est ensuite reprise en 1230 par les Chrétiens.
Malgré cette tumultueuse histoire, de nombreux monuments d’Augusta Emerita ont traversé les âges. L’ensemble archéologique de Mérida est aujourd’hui l’un des sites archéologiques les plus vastes d’Espagne. Son état de conservation a justifié son inscription au patrimoine mondial de l’humanité en 1993 comme un excellent exemple d’une capitale provinciale romaine. Quant aux recherches archéologiques, elles y ont encore un bel avenir.
Une mosaïque de Méduse typique de la décoration des maisons romaines.
C’est dans la zone archéologique de La Huerta de Otero, située à l’ouest de Mérida, que les archéologues espagnols ont mis au jour plusieurs mosaïques étonnantes. Elles décoraient la pièce principale d’une domus romaine. L’image de la Méduse est placée dans un médaillon octogonal, encadré en ses quatre coins par des paons, qui incarnent les quatre saisons. La tête est surmontée d’une paire d’ailes, une variation artistique que l’on retrouve dans d’autres représentations romaines. L’ensemble de la mosaïque mesure environ 30 m² et comporte aussi des motifs géométriques et des images de fleurs et d’animaux, notamment des oiseaux et des poissons.
Méduse est l’une des trois Gorgones de la mythologie grecque, et la seule d’apparence humaine et d’une grande beauté. Pour résumer le mythe, Méduse, divinité primordiale mais cependant mortelle, fut violée par Poséidon dans le temple d’Athéna, puis châtiée par cette déesse (on pourrait parler de double peine) et transformée en monstre dont la tête est recouverte de serpents. Elle avait la capacité de transformer ceux qui la regardaient dans les yeux en pierre. C’est finalement le héros Persée, avec l’aide d’Athéna, qui parvient à la tuer en se servant de son bouclier comme d’un miroir. A partir du milieu du Ve siècle, le gorgonéion (masque de Méduse) est figuré comme ornement de l’égide d’Athéna. La représentation de Méduse prend une dimension de protection, notamment pour préserver du mauvais œil. A l’époque romaine, la représentation de Méduse est particulièrement prisée pour décorer de nombreux objets, mais aussi pour orner le panneau central des mosaïques au sol.
La mosaïque de Méduse de Mérida s’inscrit dans ce contexte, et on peut la comparer à d’autres œuvres similaires dans l’empire romain où elle avait pour fonction de décorer mais aussi de protéger symboliquement la maison.
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